Débranchée : quand une voix off coupe tout pour mieux s’écouter
Il y a des jours où je
coupe tout.
Le micro, les écrans, le casque, les notifications.
Même le souffle de la cabine semble de trop.
Je ferme la porte du studio, et pour une fois, je ne veux plus entendre ma voix.
Pas celle qu’on enregistre, pas celle qu’on envoie, pas celle qui raconte les histoires des autres.
Juste le silence.
Ce silence qu’on fuit souvent, parce qu’il met face à soi.
Parce qu’il nous rappelle qu’avant d’interpréter, d’ajuster, de livrer un ton juste, il faut d’abord
se réaccorder.
Être
voix off, c’est vivre branchée en permanence :
branchée à un micro,
connectée à un brief,
reliée à des clients,
et parfois, trop connectée à tout le reste.
On parle, on enregistre, on communique.
Mais à force de tout brancher, on finit par
se débrancher de soi.
Alors il y a ces moments précieux où je débranche tout.
Pas par lassitude, mais par nécessité.
Parce qu’on ne peut pas prêter sa voix au monde entier sans parfois
la récupérer un peu pour soi.
Ces instants-là,
personne ne les voit.
Ils ne s’enregistrent pas, ne se postent pas.
C’est un café pris sans téléphone, une marche sans podcast, une respiration sans fond sonore.
C’est juste moi et le silence.
Et dans ce silence, quelque chose se remet à sa place.
Le rythme.
L’envie.
La justesse.
Parce qu’une
voix off, ce n’est pas une machine à parler.
C’est une oreille qui écoute, un cœur qui ressent, un souffle qui vit.
Se débrancher, c’est retrouver ce que le métier a parfois tendance à étouffer :
le plaisir pur de
ressentir avant de dire.
De ne plus chercher à être parfaite, mais
présente.
De ne plus produire, mais
respirer.
Et quand je rebranche enfin le micro,
je sais ce que je dois dire.
Et surtout, pour qui.
Parce qu’avant de prêter ma voix au monde,
je dois d’abord
l’écouter vivre un peu dans le silence.













